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Ionuţ Caragea în antologia "Aphorismes roumains d'aujourd'hui",
ed. Stellamaris, Brest, France, 2019
 
Né le 12 avril 1975 à Constanţa, Roumanie, Ionuţ Caragea est poète, prosateur, critique littéraire, éditeur, auteur d’aphorismes et promo- teur culturel. Il est membre de l’Union des Écrivains de Roumanie.
Il est l’un des 20 auteurs publiés par l’Anthologie de l’aphorisme roumain contemporain, Éditions Genesi, Turin, 2013. En juin 2013, il remporte le Prix de créativité au Concours international Naji Naaman, Liban, pour  des aphorismes extraits du volume Le Dictionnaire de la Souffrance, Éditions Fides, Iaşi, 2008, traduits en français par Constantin Frosin. A participé aux deux premières éditions du Festival international de  l’Aphorisme pour les Roumains de par le monde, Tecuci, Roumanie, Il a remporté le Prix spécial Mihai Pauliuc en 2017 et le Grand Prix – le Trophée Sapiens Piroboridava en 2018. Il est inclus dans les anthologies les plus récentes de l’aphorisme roumain.
Durant la période 2003-2011 il a vécu à Montréal, où il fut instructeur sportif et sportif de performance rugbyman. Il est devenu citoyen canadien en 2008. Il fonde, le 16 juillet 2008, avec le poète Adrian Erbiceanu, l’Association des Écrivains de Langue Roumaine du Québec  et les éditions ASLRQ. En février 2012, il rentre en Roumanie et s’établit à Oradea.
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En tant qu’auteur, il a publié plus de 40 livres. La critique littéraire roumaine le considère comme l’un des leaders de la génération poétique de l’an 2000 et l’un des écrivains roumains les plus originaux et atypiques. Biographie détaillée : www.ionutcaragea.ro.
 
L’aphorisme est la pépite d’or
que l’aphoriste trouve parmi les méandres de l’inspiration.
 
La pierre de David a brisé une montagne de chair.
L’aphorisme peut lui aussi briser une montagne de littérature.

Les croix sont de simples emplâtres pour le visage de la terre.
  
Quand l’arc-en-ciel paraît,
Dieu nous rappelle que notre âme est le plus beau livre à colorier.
 
De même que le nénuphar ouvre au-dessus du lac, le verbe ouvre au-dessus des pleurs.
 
Dieu est l’architecte de ma voûte palatine,
mais il m’a laissé les mots pour décorer le théâtre de cette vie.
 
Le vrai peintre des mots est celui qui fait son autoportrait en fermant les yeux sur la toile immaculée de l’âme.
 
Il est des fois où l’amour te frappe tel un boomerang sur la tête, juste lorsqu’on espère prendre l’oiseau au vol.
 
L’amour est un carrefour à sens giratoire.
À force de tourner autour du même cœur, on perd ses larmes.
 
Au lieu de remplir l’espace environnant de notre propre conception de la vie,
remplissons plutôt d’amour le vide d’entre nous.
 
L’amour : un miracle qui passe d’un corps à l’autre, tout en remémorant l’infini.
 
Dieu ne reprend jamais son souffle, il n’a pas de cesse de l’offrir.

Quand Dieu a fait le monde, d’un œil il pleurait, de l’autre il riait.
Il pleurait car il savait combien on allait souffrir,
il riait à l’idée qu’on allait lui tenir pourtant compagnie.

Pour être admis au cœur d’une femme, on n’a pas besoin de la carte de son corps,
mais de la carte des rêves à accomplir avec elle.
 
Le bonheur est le trou de la serrure
par où l’on épie ce que le rêve est seul à toucher.
 
Le bonheur n’est ni blanc, ni noir.
Il est multicolore, comme l’arc-en-ciel et dure tout aussi peu.

La ligne de l’infini commence avec la ligne de nos paumes.
 
Combien de battements de cœur pourraient remplir le rien, le silence et tout l’univers ?
 
Le cœur – un pétale tombé de la corolle d’un rêve.
 
Mon cœur est l’ombre d’un papillon égaré parmi les étoiles.
 
Mon cœur est un mouchoir plié. Déplié, il est aussi vaste que le ciel.
 
Si les humains avaient eu des ailes, ils seraient des oiseaux de proie. Jamais des anges.

La larme est le testament d’un amoureux.
 
Les larmes sont des oiseaux de feu ayant perdu leurs ailes.
 
La lune figure une montre sans aiguilles ; devant elle, on peut passer son enfance sans fin.
 
Mes os sont alignés dans un instrument musical où ne souffle que la mort.
 
Journées noires et nuit blanches
les touches d’un piano où la mort joue le requiem de l’humanité.
 
J’ai découvert le secret de l’immortalité en avalant mes larmes.
 
Les oiseaux cachent l’éternité sous leurs ailes.
 
On est les mains tremblantes en cherchant l’immortalité sur le clavier noir et blanc d’un piano
désaccordé par la marche funèbre du temps.
 
La poésie est un passage clouté entre vie et mort.
 
On rêve le réveil à la tempe.

Dans la vie, il faut être lucide et circonspect.
L’amitié de certains est aussi grande qu’un cheval de Troie.
À peine a-t-on accepté leur présent,
qu’ils ont vite fait de vous passer la main dans le dos pour faire de vous leur victime.
 
La solitude paresse comme un serpent au coin du feu du cœur, repu de souvenirs.
 
Mon âme est un cerf-volant à deux attaches. L’une est formée de larmes, l’autre de rêves.
 
La main du temps ne tremble jamais.
Il promène lentement son bistouri sur nos visages tel un criminel en série féru de son art.
 
L’ombre vit une moitié de la vie en dehors de l’homme, et l’autre moitié à l’intérieur, en respirant des rêves.
 
Le plus bel instrument musical, c’est l’univers.
Dieu règle ses cordes par la révolution des galaxies.
 
La vie est un hôpital où les gens sont traités par des pilules de mépris, tandis que la mort inventorie les âmes.
 
La vie est un musée aux hommes en cire
qui s’enfuient effrayés par les ombres, en fondant.
 
Qu’est-ce qu’un rêve?
Un film de l’immortalité développé par l’âme dans la chambre obscure de l’esprit.
 
traduceri de Constantin Frosin
 

Sursa: Ionuţ Caragea, 2019