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Poezii de Mihai Eminescu traduse în franceză de Constantin Frosin

 
 
LE SOIR, LÀ-HAUT

Le soir, sur la colline, le buccin se lamente,
Les troupeaux remontent, les étoiles brillent par la sente,
Les eaux sanglotent,
prenant clairement leur source aux puits;
Sous un acacia, tu es là qui m’attends, chérie.

La lune traverse le ciel, sacro-sainte et notoire,
Tes grands yeux ont l’air de scruter les feuilles bien rares,
Les étoiles naissent humides à même le dôme serein
Ta poitrine brûle, de pensées ton front est bien plein.

Les nues ruissellent, maint rayon leurs bancs importune,
D’anciens auvents élèvent les maisons dans la lune,
Là-bas, grince au gré du vent, le chadouf du puits
La vallée s’embrume, flûtes murmurent dans la bergerie.

Les gens reviennent, fatigués, faux sur l’épaule,
Depuis les champs, le tocsin sonne plus fort, comme fol,
La vieille cloche remplit toute la soirée de sa voix,
Mon âme, elle, se consume d’amour avec éclat.

Ah ! sous peu, le village dans la vallée reste coi ;
Ah ! sous peu, pour te rejoindre, moi je presse le pas ;
Nous resterons sous l’acacia la nuit entière,
Des heures durant je te dirai comme tu m’es chère.

Nous deux, on couchera nos têtes l’un sur l’autre, tout beau
Tout souriants, nous nous endormirons sous le haut
Et vieil acacia. – Pour une nuit si accomplie,
Qui ne paierait en échange, le prix de sa vie ?

(Traduction Constantin Frosin)


COMBIEN DE FOIS, MON AMOUR

Toutes les fois, ô, mon amour, que nous deux je me rappelle,
Un vrai océan de glaciers se présente à mon appel :
Là-haut, à même la voûte céleste, la moindre étoile se cache,
Juste dans les grands lointains, la lune dorée forme comme une tache ;
Et au-dessus des milliers de glaçons par les vagues charriés
Un oiseau plane, les survole de ses ailes très fatiguées,
Alors que son couple préféra aller de l’avant
En compagnie d’autres volées se perdant au Ponant,
Il le poursuit d’un doux regard, rempli de compassion,
Ne le regrette, ni ne s’en réjouit… c’est son extinction,
Tout en rêvant de remonter dans le temps, au jeune âge.

(Traduction Constantin Frosin)


Ô, QUELS LOINTAINS NOUS SÉPARENT…

Je suis fort loin de toi et, tout seul au coin de l’âtre,
Revois par la pensée ma vie de malheur, grisâtre,
Il me semble avoir vécu quatre-vingt ans, toute une vie,
Etre vieux comme l’hiver et que tu as déjà péri,
Le souvenir fonce sur mon âme, il va et revient
Tout en éveillant dans mon esprit ces anciens riens ;
De ses doigts, à ma fenêtre le vent vient se suspendre,
Me revient par la tête le fil de nos histoires tendres,
Alors, comme dans les brumes,
devant mes yeux tu repasses
Tes grands yeux baignés de larmes,
tes frêles mains comme de glace ;
De tes deux bras ensemble, tu te suspends à mon cou
Comme pour me dire quelque chose…
puis tu soupires, comme à bout…
Je te serre sur mon sein, mon avoir d’amours, de beau,
C’est par accolades qu’on réunit nos vies, nos pauvres lots…
O, puisse le souvenir rester toujours interdit,
Afin d’oublier la chance dont, un moment, j’ai joui,
Pour t’oublier toi qui, d’un coup, à mes bras t’arrachas…
Je serai seul et vieux, tu seras déjà morte, toi !

(Traduction Constantin Frosin)

Sursa: www.aslrq.ro